lundi 5 octobre 2020

Kai Men She : ouvrir les portes de la pratique ou comprendre les règles du jeu

Kai Men She est un exercice de présentation des pratiques internes des Daoyin Fa Qi Gong en général et de l’école taoïste du Ling Pao Ming (école du Joyau Sacré) en particulier.

Il s'agit d'une pratique de synthèse servant de préparation corporelle et énergétique. 

Kai Men She permet une découverte des exercices d'entretien de la vitalité - Qi Gong - , et permet de comprendre les principes essentiels à cet entretien. En ce sens, Kai Men Shi ouvre des portes et offre la possibilité d'appréhender les règles fondamentales.

 

L’enchaînement se déroule de la façon suivante :

 

1

WUJI – L’ORIGINE

2

MARCHE IMMOBILE : balancer les bras

3

PRENDRE LA SPHERE DANS LES MAINS

4

CALMER ET PACIFIER

5

EVEILLER ET CONCENTRER

6

MOBILISER ET STABILISER

7

TROIS MOBILISATIONS/REGENERATIONS : PETITE, MOYENNE, GRANDE

8

ACCROITRE POUR UTILISER : mobilisation/accueil/conduite/contrôle/utilisation

9

PRENDRE L’ENERGIE EN MAIN : massages des mains

10

AUTOMASSAGES :

Tonifier le centre inférieur

Disperser le centre médian

Répartir l’énergie ancestrale

Mobiliser les membres supérieurs

Stabiliser les membres supérieurs

Ouvrir le centre supérieur

11

L’ETRE HUMAIN ENTRE CIEL ET TERRE :

Accueillir l’énergie céleste

Comprendre l’essence terrestre

Echanger avec l’être humain

12

OUVRIR LES 12 PORTES

13

DEUX HARMONISATIONS :

harmonisation d’accueil (3)

harmonisation de retour au calme (2)

14

PETIT SALUT

15

LIBERER LE BASSIN :

côté/droite-gauche/haut-bas/dextre (3)/senestre(2)

16

RENFORCER LES GENOUX

17

LAISSER L’EMPREINTE DES PIEDS : talons/orteils

18

S’ASSEOIR (en croisant sur l’avant)

19

RECHAUFFER LES GENOUX

20

S’ETENDRE ET ENLACER LE CIEL

21

ENLACER LES MAINS, S’ETENDRE ET BAILLER

22

SE RELEVER EN SPIRALE

23

MARCHE IMMOBILE : petit balancement de retour

24

WUJI – RETOUR A L’ORIGINE

 La pratique commence avec une posture de réglage et d'alignement : Wu Ji

Wu Ji, signifie le Sans Forme, le Non Manifesté, Les Choses Telles Qu'Elles Sont...

C'est ce qui est indéfini avant la création du ciel et de la terre, ce qui contient tout sans le montrer, à l’image même du Tao.

Wu Ji, c’est La position de l’homme centré dans l’univers. Cette posture préconise le placement correct du corps suivant l’axe de la colonne vertébrale et du bassin. Elle se prend suivant les principaux réglages qui déterminent l’alignement et le positionnement du corps :

Equilibre sur le plan frontal, sur le plan sagital, le plan horizontal, se placer entre extension et flexion, ouverture et fermeture, s’aligner sur l’axe verticel, et situer son corps sur l’axe du ciel et de la terre.

Dans cette position qui privilégie une légère rétroversion du bassin, les épaules sont tombantes, le menton est légèrement rentré et le sommet du crâne légèrement tiré vers le haut. Les pieds sont parallèles et la posture se stabilise par un jeu subtil du transfert du poids du corps tout d’abord sur les talons (Terre), puis sur la pointe des pieds (Ciel) afin de centrer ce poids sur la plante du pied (Homme).

On agit ainsi par ce jeu simple du positionnement du corps sur les trois diaphragmes ostéopathiques : le diaphragme crânien, thoracique et pelvien.

La médecine chinoise traditionnelle prend en compte : la structure corporelle (os, tendons, muscles, etc.), les fluides (sang, liquides lymphatiques, eau, etc.), les organes et les viscères, l’essence fondamentale véhiculée dans les os (le Jing), l’essence fondamentale véhiculé dans le souffle et le sang (le Qi), ses diverses manifestations (Hun, Po, etc.) et l’essence fondamentale véhiculée par l’esprit (le Shen).

L’entretien de la santé, de la vitalité (but principale du thérapeute en médecine traditionnelle chinoise) passe par la conservation du bon fonctionnement de ces divers éléments.

La structure corporelle est entretenue globalement dans Kai Men She, par un jeux successif de mouvements de plus ou moins grandes amplitudes, par un travail mettant en action les articulations, les axes principaux du corps (bassins, colonne vertébrale, etc.), les tendons et les muscles, la position. Il s’agit là de toute la partie apparente, périphérique et superficielle (gymnique) de Kai Men She. 

Le travail sur les fluides et le Qi intervient plus précisément dès le début de la pratique avec les exercices de 1 à 6.

Georges Charles, de l’école San Yi Quan explique :

« Dans la pratique du Tao-Yin Qigong de l’Ecole Taoïste du Ling Pao Ming (Ling Pao Ming Siu Tan Pai Tao Yin Qigong), codifiée au XIIIe siècle il existe dans les formes préparatoires du Kai Men Shi (« Ouvrir les Portes de la Pratique ») et du Yi Yin Fa (« Exercices Préparatoires) plusieurs types de balancements rythmiques qui permettent de mobiliser spécifiquement l’énergie vitale (Qi) grâce à des mouvements liquidiens (Jing) profonds et ceci en vue d’obtenir un effet particulier.

Calmer le Cœur et Pacifier l’Esprit (An Xin Jing Shen) :

Il s’agit d’un balancement latéral plus ou moins rapide, plus ou moins tendu, plus ou moins ample, dont le but est de pacifier l’Esprit (Jing Shen). En effet dans la  conception chinoise classique le Cœur (Xin) engendre une entité viscérale (ou une fonction extraordinaire) qui est l’Esprit (Shen). Lorsque le cœur est calme l’esprit est donc en paix. Calmer le cœur permet de pacifier l’esprit. Un cœur agité par la colère, par l’envie, par la méfiance engendre un esprit belliqueux et agressif. Les pratiques chinoises issues du Taoïsme, du Bouddhisme, du Confucianisme attachent une grande attention à ce que l’esprit soit pacifié mais il ne s’agit en aucun cas d’une espèce de « légumisation » ou d’endormissement de la conscience. Pour éviter ce risque une seconde série de balancements suit cet exercice.

Eveiller les Sens et Concentrer l’Energie (Kai Tang He Qi) :

Le balancement est frontal, donc d’avant en arrière et suit le rythme de celui pratiqué précédemment. L’action se situe principalement entre le sommet du crâne (point Baihui) et le centre du périnée (point Huiyin) et implique de ce fait un mouvement crânio-sacré bien connu des ostéopathes. Il convient alors de jouer entre ténèbres (Yin) et clarté (Yang), d’inspirer en montant et d’expirer en descendant.  En montant les bras s’entrouvrent au niveau du diaphragme et en descendant elles se rejoignent au niveau de la symphyse pubienne. Il convient d’éveiller les sens (littéralement « ouvrir les sens » (Kai Tang)) mais sans en devenir l’esclave. Donc en respectant la « juste mesure ».

A ce sujet l’un des grands philosophes Taoïstes, Zhuangzi (Tchouang Tseu) explique (L’œuvre complète II) : « C’est en marchant que la Voie est tracée, c’est en les nommant que les choses sont définies. La juste mesure permet la pratique, la pratique amène un résultat, le résultat représente le succès. Parvenir au succès est proche du Tao. Il faut affirmer les faits ». Il convient également de concentrer l’énergie (He Qi) sans bloquer ou enfermer celle-ci. Elle doit être concentrée mais libre d’agir.

C’est pour cette raison qu’il existe une troisième série de mouvements rythmiques.

Mobiliser l’Energie et Stabiliser la Posture (Dong Qi Xi Tai) :

Ce mouvement est un balancement vertical. Dans la phase de mobilisation (Dong) les mains paumes vers le haut montent jusqu’à la poitrine dans une inspiration. Dans la phase de stabilisation (Xi) les mains redescendent paumes vers le sol jusqu’au niveau des hanches. La mobilisation de l’Energie (Dong Qi) permet d’affermir la posture (Xi Tai) et, par contre coup une posture bien stabilisée permet à l’Energie de mieux se mobiliser, donc d’agir. La mobilisation Dong correspond également au caractère classique désignant l’Orient (soleil montant), la stabilisation Xi correspond également au caractère classique désignant l’Occident (soleil couchant). Originellement les extrême orientaux avaient l’habitude de s’agenouiller tandis que les occidentaux avaient, et ont, l’habitude de s’asseoir. Ce qui implique des différences dans la perception du mouvement. Les orientaux nous considèrent comme « assis » et quelque peu sclérosés dans nos habitudes et dans nos attitudes. Ils considèrent donc que la tradition est toujours en mouvement et toujours renouvelée. De l’autre coté du miroir nous avons, évidement, une conception quelque peu différente de cette tradition orientale ! Précisons encore que le Qi (Chi, Tchi, Tsri, Ki…en fonction des transcriptions utilisées) possède, dans les dictionnaires classiques de la langue chinoise, plusieurs définitions particulières. La première d’entre-elles est simplement l’air. La seconde est le souffle. La troisième est l’énergie. La quatrième est la vitalité. C’est la logique chinoise. Si il y a air, il y a souffle, si il y a souffle il y a mouvement, donc énergie, si il y a énergie et mouvement il y a vie donc vitalité. Sans mouvement, sans énergie, sans souffle et sans air il n’y a pas de vie. Respirer c’est motiver le souffle, motiver le souffle c’est favoriser l’énergie, favoriser l’énergie c’est s’ouvrir à la vie.

Cette dernière série peut également s’effectuer en position agenouillée ou/et en position assise.

La mobilisation correspond à des mouvements circulaires dans le sens des aiguilles d’une montre (dextrogyre) en allant de la périphérie en surface vers le centre et la profondeur. L’image est de saisir la lumière superficielle et périphérique et de l’amener vers le centre et la profondeur en vue d’une « clarification » (Ming).

La stabilisation correspond à des mouvements circulaires dans le sens des aiguilles d’une montre (sénestrogyre ou lévogyre) en allant du centre en profondeur vers la surface en périphérie. L’image et d’aller chercher en profondeur ce qui est usé, ancien et de l’amener vers l’extérieur en vue d’une « purification » (Xing).

Un mouvement de synthèse (entre clarification et purification) correspond à des mouvements en lemniscate (infini en forme de 8 horizontal) et ceci dans deux directions différentes possible.

La raison profonde de ces divers balancements est de permettre au corps de libérer les entraves de protection qui limitent, justement, le mouvement profond des liquides. En effet, le cerveau est tout particulièrement protége par le crâne mais également par le liquide céphalo rachidien qui s’oppose aux mouvement violents qui seraient en mesure de blesser le cerveau. Des membranes intra crâniennes (méninges, faux du cerveau, tente du cervelet) limitent également, par simple tension de réaction, ces mouvements. C’est le principe d’un œuf cru placé dans un bocal. Si on remue le bocal on casse l’œuf. Si on remplit ce bocal d’eau froide il devient plus difficile de casser l’œuf. Avec de l’eau tiède et salée cela devient très difficile. Si, de plus on place l’œuf dans un sac en plastique il devient impossible de le casser sans casser le bocal. Mais cela limite le mouvement de l’œuf dans le bocal ! Par un balancement lent, rythmique et progressif on parvient à mobiliser l’œuf sans risque de le briser. Lorsque le corps se méfie, à juste titre, du mouvement que l’on va faire effectuer au crâne il renforce ces défenses limitant le mouvement du cerveau. Le cerveau est protégé mais immobile, voire contraint. En habituant le corps progressivement à un mouvement non agressif, donc considéré comme non dangereux et même plaisant, il relâche naturellement ces défenses et le cerveau retrouve sa mobilité et un état de veille assez proche de celui de la méditation ou du rêve. Et libère le mouvement du liquide (Jing) et par conséquence de l’énergie (Qi) de manière, grâce à la juste mesure, de parvenir à un résultat. Donc de s’approcher du Tao.

Quelques définitions classiques qui permettent d’y voir un peu plus clair : « c’est en nommant les choses qu’elles sont délimitées » : respiration Re (relier) Spir (l’esprit) axion (à l’acte).

Respirer c’est relier l’esprit à l’acte. Dans l’inspiration l’esprit (Spir) agit (axion) ) l’intérieur (In) tandis que dans l’expiration l’esprit agit vers l’extérieur. La décontraction c’est enlever (De) ce qui empêche (contre) d’agir (action), la relaxation c’est re-lâcher-l’action ou laisser-faire mais en conservant son axe, donc son équilibre.

La méditation c’est, étymologiquement Agir (Action) Centré (Médius). Les termes sanscrits de Dhyana, chinois de Chan Na (Chan), japonais de Zen Na (Zen) désignant la méditation correspondent également à la définition classique et simple d’Agir Centré. Il est difficile de retrouver son centre si on ne délimite pas la périphérie. Ces balancements permettent de définir corporellement cette périphérie, donc d’agir avec la conscience du centre. Par la suite on retrouve l’aphorisme « Dans la méditation le centre est partout, la périphérie nulle part ».

Cela implique que le centre se retrouve dans toutes les parties du corps et du mouvement, ce qui permet alors d’échapper à la contrainte du milieu périphérique (qui peut être social, religieux…) donc d’être libre d’agir. »    

Le Qi cesse d’exister la où apparaît la forme, sauf si cette forme est animée d’un mouvement.

Aussi, afin de pouvoir utiliser le Qi, il convient de mettre le corps en mouvement.

La mobilisation du Qi en vue de son utilisation devient alors possible, et si on respecte les règles de travail du Qi, le potentiel de l’énergie devient alors optimale.

Pour optimiser le travail du Qi il convient dans un premier temps de mettre en branle celui-ci, puis de le mobiliser afin de l’absorber, pour finalement le conduire en vue de le contrôler pour l’utiliser (Shi Ban Gong Bei : pour moitié d’effort, résultat double).

L’utilisation du Qi peut être alors faite à l’appréciation de chacun, soit pour des massages, mais aussi pour l’acupuncture, la calligraphie ou tout simplement la cuisine.

Pour des auto-massages (Anmo), on peut par exemple partir des paumes (terre), se diriger vers les tranchants (métal), les bouts des doigts (eau), la saisie des paumes (bois) et enfin le dos des mains (feu), dans le but de concentrer l’énergie sur les mains afin de pratiquer ces auto-massages.

Les trois sources du Qi

Le Qi (le Souffle, la Vitalité) a trois sources.

Ces trois sources fournissent à notre corps le Qi Vital (Qi Ji)

La première source de vitalité nous est apportée par nos parents. On parle de Qi Inné (Yuan Qi). C’est en quelque sorte et très vulgairement notre patrimoine génétique. Un Yuan Qi fort permet déjà d’avoir un terrain propice à une bonne résistance aux maladies.

Yuan Qi ne peut pas être augmenté. Il va obligatoirement en diminuant au fur et à mesure que nous vieillissons. Par contre on peut aisément l’entretenir.

Ce Qi inné s’exprime dans ce que les chinois appellent le Réchauffeur Inférieur, qui se compose principalement de l’énergie manifestée dans les reins et le foie et dont le point d’acupuncture principal d’émanation est Ming Men (4eme point du vaisseau gouverneur – entre les épineuses des 2e et 3e vertèbres lombaires)

La seconde source de vitalité est en rapport direct avec notre alimentation. Le Qi Alimentaire (Gu Qi) s’exprime quand à lui dans ce que la médecine chinoise classique nomme le Réchauffeur Médian ou Moyen, qui concerne principalement l’Estomac et la Rate.

La troisième source, est, quant à elle, en rapport direct avec l’air que nous respirons. On parle de Qing Qi (énergie pure) ou Da Qi (grande énergie). Cette troisième source d’énergie directement apportée par l’air que nous respirons, alimente le Réchauffeur Supérieur, composé de l’énergie émanant des poumons et du cœur.

Ces trois sources énergétiques s’épanouissent donc dans trois régions du corps humain qu’en médecine chinoise on nomme les Trois Réchauffeurs, ou Trois Foyers ( San Jiao ).

D’un point de vue plus antique et plus ésotérique (du grec esôterikos « de l’intérieur »), ces trois foyers d’énergie peuvent être compris d’une manière plus profonde.

Le Réchauffeur Inférieur qui accueille l’énergie (l’impulsion de vie) que nous ont légué nos parents est lié dans les classiques taoïstes à la Terre.

Cette partie de notre être est le siège des activités physiques, l’origine des formes et des structures Yin nourricières (dont le sperme et l’ovule en sont les plus évidents exemples).

Le Réchauffeur Médian, qui accueille l’énergie des aliments est lié quant à lui à un niveau de compréhension que les chinois désignent communément par l’image de l’Homme ( le mot Ren en chinois que l’on traduit à tort par homme avec un grand H indique indifféremment l’homme et la femme et devrait plutôt se traduire par Etre Humain).

C’est le palais des activités sensorielles ou artistiques, donc l’origine profonde des énergies et des mouvements Yang.

Dans les classiques taoïstes (tout comme en médecine chinoise traditionnelle) ce palais médian est directement lié au Réchauffeur Supérieur, ou Palais céleste, car le palais de l’homme est également le siège de l’énergie nourricière (issue de la rate et de l’estomac) résultant de la transformation conjointe des aliments, des boissons mais aussi de l’air.

Le Palais Céleste (lié au Réchauffeur Supérieur) s’exprime principalement par le point Tiantu (22e point du vaisseau gouverneur – milieu du creux sus-sternal).

Dans la tradition antique des Daoyin Fa, Maître Georges Charles, de l’école San Yi Quan explique : « ce palais est communément appelé Hangong, ou Parvis Céleste. Etymologiquement c’est la place de la Porte de la Paix Céleste (Tian An Men), qui précède la Cité Impériale (Hang Cheng), la Ville Pourpre (Zijin Cheng) et le Palais Impérial (Gu Gong). C’est la place où l’homme regarde vers le ciel. Originellement cette place représentait le passage obligé du monde profane vers le monde du sacré, ou la transformation de l’émotif vers le spirituel. Comme l’histoire le démontre, il s’agit toujours d’un passage difficile, d’une porte étroite. C’est le siège du Principe Vital purifié s’élevant vers les plus hauts sommets. »

Chacun de ces réchauffeurs et des palais taoïstes qui y correspondent ont trois portes, trois niveaux d’ouvertures. Une porte haute, une porte moyenne et une porte basse. Il existe en outre trois portes de transition : le passage de la terre vers l’homme, de l’homme vers le ciel et la porte de retour du ciel vers l’homme et la terre.

 

L’exercice 12 de Kai Men She (ouvrir les douze portes) travaille donc sur tous ces principes précédemment décrits.

Il s’agit à travers cet exercice de procéder à une élévation successive au travers de la forme corporelle (Xing – liée à la Terre), de la respiration (Qi – liée à l’homme) et de la sensation (Ganjue – liée au ciel) dans les divers pavillons ou palais de ces trois centres d’énergies.

C’est un exercice globale du travail de l’énergie vitale ( Qi Ji ) qui englobe l’énergie des reins, du foie, de la rate, du cœur et des poumons.

Il est dit que le Qi acquis (celui que l’on développe par la nourriture et la respiration) va alimenter l’énergie du Qi Inné (celui des reins que l’on hérite de nos parents), mais pas « l’inné » du Qi Inné.

Travailler globalement sur ces trois palais (et donc sur les trois réchauffeurs qui y correspondent) permet donc d’entretenir le Qi Inné et de ralentir sa déperdition.



Ces trois réchauffeurs (San Jiao) accueillent six points d’acupuncture principaux, que la tradition des praticiens du Tao nomment les Six Dragons. Ces Six Dragons gardent Cinq Palais, cinq zones vitales liés à des sensations profondes que le jeu subtil de la respiration profonde (Tai Xi) et du mouvement permet de capter, d’amplifier et de potentialiser.

Pourquoi parle t-on de « réchauffeur » ?

Tout simplement parce que l’une des fonctions principales du Qi est le réchauffement. Le Qi a fondamentalement cinq fonctions :

  1. le réchauffement
  2. la propulsion : Qi et sang marchent ensemble. Quand le sang ralentit, le Qi aussi et inversement.
  3. la défense : c’est la fonction du Qi qui nous met en accord avec tout ce qu’il y a autour nous et nous prémunit des attaques extérieures (vent, froid, chaleur, etc.)
  4. l’homéostasie : fonction de régulatio et de rétention, en vue de contrôler (sueur, urine, etc.) et de maintenir (maintient des muscles, des organes, etc.)
  5. la transformation : la matière se transforme et devient une autre matière (la nourriture se transforme en sang ou en fèces, etc.)

Afin d’assurer convenablement ces diverses fonctions, le Qi doit être correctement alimenté (et doit donc avoir des réserves dans lesquelles puiser) et doit circuler correctement (et donc avoir des voies d’accès et de transport efficientes).

 

Les réserves du Qi sont nombreuses. Les plus importantes sont les organes et les viscères et aussi des canaux d’énergie particulier, que l’on appelle Méridiens Extraordinaires.

Ces Méridiens Extraordinaires ou Merveilleux Vaisseaux (Qi Jing Ba Mai) alimentent douze méridiens principaux (Shi Er Zheng Jing) qui relient entre eux viscères et organes.

Chaque organe va délivrer un Qi ayant une fonction, une qualité particulière. L’énergie délivré par ces organes, peut se trouver en excès ou en vide d’énergie.

Suivant une loi classique de la médecine chinoise connue sous le nom de « Loi des Cinq Eléments », mais plus justement et plus précisément sous le nom de « Loi des Cinq Mouvements », les énergies des organes et des viscères vont ainsi pouvoir s’équilibrer ou se déséquilibrer.

Nous ne rentrerons pas dans les théories fondamentales de la médecine chinoise traditionnelle.

La loi des Cinq Eléments n’est qu’une des théories de la médecine classique chinoise et pas forcément le plus importante. Elle a même été délaissée durant une longue période au profit d’autres théories de soins et de diagnostiques.

 

Elle nous permet juste de citer ici quels sont ces éléments et le lien fait avec les organes. C’est de cette théorie qui prend sa source dans les œuvres antique des praticiens du Tao tels que le Yi King ou le Traité de l’empereur Jaune, le Su Wen, que viennent par exemple Les Quatre Images (le phénix rouge, qui est rattaché au cœur, le dragon vert, au foie, le tigre blanc, aux poumons, et la tortue noire, aux reins).

 

Ces images et ces symboles permettent au pratiquant d’atteindre une énergie difficile à travailler. Cette énergie, le Shen, est la manifestation la plus élevée du Qi, car elle résulte de la transformation du Qi.

 

La tradition taoïste explique que le Jing (l’énergie de l’essence séminale contenue dans les reins et les os), par l’action du souffle se transforme en Qi, et que le Qi qui est travaillé, peaufiné, se transforme quand à lui en Shen (énergie spirituelle).

Les symboles et les images aident à fortifier ce Shen, qui grossièrement peut être assimilée à notre principe conscient, notre esprit.

Ainsi le travail sur les Six Dragons et les Cinq Palais permet comme il l’a été dit plus haut un éveil des sensations liés aux zones corporelles délimités par les Six Dragons.

q       De Hui Yin (réunion du Yin) à Qi Hai (mer de l’énergie) : ce palais est en rapport avec les sensations liées à la Terre. Hui Yin comme son nom l’indique, réunit le Yin, la matière, les formes (Xing). Qi Hai, Mer de l’energie et Hui Yin sont les points de contrôle de ce qui nous réunit à la terre, de ce  qui nous fait prendre conscience de notre corps dans sa globalité. Quand la respiration agit sur ce point et qu’on parvient à en avoir une écoute subtile, on peut ressentir le Mouvement Respiratoire Primaire (M.R.P), mouvement respiratoire crânio-sacré, décrit par les ostéopathes comme étant le mouvement respiratoire antérieur à la respiration normale, et s’arrêtant quelques temps après la mort.

Ces sensations organiques profondes sont généralement diffuses et fort mal localisées. Elles sont qualifiées de « coenesthésie », ne répondant à aucun organe en particulier, et sont le fait de corpuscules nerveux disséminés dans la profondeur de nos viscères. Cette sensibilité profonde nous renseigne habituellement sur l’état de nos muscles (sensation de fatigue), sur l’état de la circulation générale (sensation de faim ou de soif), sur l’état de nos nerfs, etc. L’ensemble de ces sensations constituent donc l’expression subtile de l’état de notre organisme et de son fonctionnement.

q       De Qi Hai à Zhong Ting (Palais central). Nous sommes là dans le palais des activités sensorielles ou artistique.

q       De Zhongting à Tiantu (Pénétrer le firmament) : Ce palais conditionne notre rapport au monde, dans l’optique de nous ouvrir à celui-ci, mais aussi de nous l’accaparer, de s’approprier l’extérieur. On peut y voir l’expression du désir, mais plus profondément, celle de la volonté.

q       De Tiantu à Yingtang (palais du silence) : ce palais définit par ces deux dragons s’appelle Ming Gong, c'est-à-dire Palais de la lumière. Ce stade est relié au Ciel et est symboliquement représenté comme un cercle ou une sphère exprimant la projection de la voûte crânienne vers le ciel. Dans la tradition taoïste du Ling Bao Ming, ce palais est le siège de l’esprit, de notre rapport aux autres dans la dimension du don, de l’ouverture de soi. Le désir accepté dans le palais précédant s’exprime dans ce palais en se redonnant, se redistribuant.

q       De Yingtang à Bai Hui (cent réunions) : le dernier palais s’exprime sur des sensations liées à notre perception de l’univers. Cette compréhension et le ressenti qui l’accompagne et qui nous accompagne tous les jours peut être en rapport avec une confession religieuse ou tout simplement un « certain point de vue sur la vie ».

q       Au-delà de Bai Hui, on entre dans le palais indéfini et informulé de « cet autre qui est après »… La sensation y est beaucoup plus ésotérique (intérieure) et aussi beaucoup plus difficile à décrire.

En conclusion…

Des exercices de basculement du corps à la respiration (re : relier, spir : l’esprit, axion : action) en position allongée l’exercice de l’ouverture des portes de la pratique (Kai Men She) nous offre un tour d’horizon complet des pratiques du Tao.

« De tout temps, ceux pratiquent le Tao sont (…) » Lao tseu, chapitre 15.

Kai Men She est une pratique globale, permettant de travailler de la périphérie vers le centre, de la position debout à la position allongée, du travail de la structure (Xing) au travail de l'esprit (Shen) en passant bien évidemment par le travail de la vitalité, le Qi.

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